Auparavant sous-culture marginale, le « shipping » - activité en ligne pratiquée par des fans qui inventent des histoires d’amour entre deux personnages de fiction ou deux célébrités de la vraie vie - s’est popularisé et est devenu une force commerciale et culturelle incontournable.
Par Yi Ziyi
« La vie est amère, mais le couple fictionnel que j’ai ‘shippé’ est aussi doux que des fraises », livre Xiao Yu, étudiante de 20 ans à l’Université des études internationales de Shanghai. Pour de nombreux adolescents et jeunes adultes en Chine à son image, avoir une relation amoureuse ne semble pas être une option réaliste. Que ce soit pour des raisons sociétales ou personnelles, ou simplement par manque de volonté d’investir du temps, de l’énergie et des émotions, un nombre croissant de jeunes se tourne vers ce qu’ils considèrent être une alternative plus sûre : le « shipping ».
Terme qui tire son origine d’Internet et des fandoms ou communautés de fans passionnés qui se regroupent autour de films, de livres ou d’émissions télévisées au milieu des années 1990, le « shipping » consiste à mettre en couple deux personnes, qu’elles soient célèbres ou fictionnelles, dans une romance inventée. Ceux qui le pratique, les « shippers » - terme issu du mot anglais « relationship » (relation), s’investissent corps et âme dans les couples qu’ils créent et vivent par procuration leur intimité fictive.
Bien qu’ils soient aussi populaires en Occident, les « shippers » chinois sont principalement influencés par la culture ACG japonaise (sigle pour Anime, Comics and Games - animés, mangas et jeux). Ils sont tout particulièrement attirés par les histoires de couples gays plus connus sous le nom de boys’ love (danmei en chinois), un genre ACG établi qui met en exergue les relations entre de jeunes hommes et cible en grande majorité les femmes hétérosexuelles.
Les « shippers » produisent un vaste corpus de fanfictions (récits d’amateurs dérivés d’une œuvre réelle), d’œuvres et de vidéos sur leurs couples fictionnels favoris, appelés « CPs » dans l’argot Internet chinois. Pour des millions de jeunes Chinois, en particulier des femmes, le « shipping » fait vivre l’expérience de l’amour hautement idéalisé auquel ils aspirent, mais qu’ils ont peu de chance de vivre un jour.
Auparavant sous-culture obscure, le « shipping » s’est énormément développé au cours des vingt dernières années.
Il s’est popularisé au milieu des années 2010, quand les studios et les entreprises ont commencé à s’intéresser au potentiel commercial apparemment illimité du phénomène.
Le 2 avril 2016, des fans encerclent les acteurs Wang Qing et Feng Jianyu à l’aéroport de Canton, province du Guangdong. Les deux acteurs sont devenus célèbres du jour au lendemain après avoir incarné un couple gay dans la web-série boys’ love en huit épisodes Falling in Love with a Rival (2015)
Chercheurs de sucre
« Il y a trois choses qu’on ne peut cacher : la toux, la pauvreté et l’amour », affirme Xiao Yu. Cette dernière est certaine que l’amour qu’elle porte à son couple fictionnel préféré, formé des acteurs Wang Yibo et Xiao Zhan, est tellement évident que tout le monde peut le voir.
Wang Yibo et Xiao Zhan ont joué pour la première fois ensemble dans la série télévisée fantastique d’arts martiaux The Untamed en 2019, adaptée du roman d’amour en ligne Mo Dao Zu Shi. Dès sa sortie, le 27 juin, The Untamed est devenue l’une des séries les plus populaires de l’année. Des millions de personnes ont été émues par la « bromance » (amitié fusionnelle entre deux hommes, contraction des termes anglais brother (frère) et romance (idylle)) platonique entre les deux personnages et l’alchimie à l’écran entre Wang Yibo et Xiao Zhan.
Surnommé « Bojun Yixiao », à l’instar des mots-valises « Brangelina » ou « Bennifer » désignant des couples de célébrités, ce couple fictionnel a de loin le plus grand fandom en Chine. Dans les Super Topics de Sina Weibo, qui sont des forums communautaires composés en fonction des intérêts des participants, « Bojun Yixiao » compte 3,4 millions d’abonnés et 8,1 millions de publications. Sur Lofter, l’équivalent chinois de Tumblr où les « shippers » publient des fanfictions et des œuvres d’art diverses, l’hashtag « Bojun Yixiao » dénombre plus de 82 400 posts et 208 millions de vues.
Contrairement aux fans d’un individu unique, les « shippers » s’intéressent davantage à la relation qui lie deux personnages fictionnels ou deux célébrités réelles, qu’on appelle « RPS » (Real-Person Shipping ou « shipping » de personnes réelles).
Les « shippers » de personnes réelles imaginent des acteurs qui jouent un couple à l’écran, comme étant en couple dans la vie réelle. Ils se donnent beaucoup de mal pour trouver des preuves de leur « amour » en scrutant absolument tout, de leurs interactions à leurs publications sur les réseaux sociaux.
Dans les communautés chinoises de fans de « shipping », cela s’appelle « chercher du sucre » (ketang). Quand les « shippers » postent « sucre » - ce qu’ils considèrent comme une preuve d’amour véritable - ils ponctuent leur publication d’un « kswl » - abréviation de « ke si wo le », qui signifie « sucré à en mourir ».
Xiao Yu se souvient de la soirée du 10 août 2019, quand les acteurs de The Untamed sont apparus dans l’émission Happy Camp. Avec d’autres « shippers », elle a regardé l’émission par chat vidéo groupé.
Les acteurs Wang Yibo et Xiao Zhan n’ont pas déçu Xiao Yu et ses amis, qui ont scruté les moindres interactions des deux stars, plan par plan, de leurs contacts visuels et expressions à leur langage corporel. « Nous avons crié et hurlé ‘kswl, kswl’ comme des fous. Nous étions tous tellement excités. Ils étaient vraiment adorables, ensemble », se souvient-elle.
« Le ‘shipping’ me rend vraiment heureuse. Ça me donne l’impression d’être amoureuse aussi. Mais cet amour est si pur et doux qu’il peut difficilement être réel. Croyez-moi, cela peut vraiment amener le cerveau à libérer plus de dopamine. La vraie vie est tellement stressante, le ‘shipping’ est devenu ma source de bonheur », complète-t-elle.
Le « shipping » ne se termine pas toujours comme dans un conte de fées. Rien n’est pire pour les « shippers » que lorsqu’un couple vit une « BE » (Bad Ending ou Fin malheureuse). Cela arrive quand le couple à l’écran cesse de travailler ou d’apparaître en public, ou lorsqu’il existe des preuves irréfutables qu’ils n’entretiennent pas de relations amoureuses.
« Le ‘shipping’ me donne toujours des frissons, comme si je jouais. C’est le jeu des devinettes ‘Est-ce pour de vrai ?’ », raconte Xia Li, étudiante de 20 ans à Shenzhen. « Tu tires une carte au poker, tu la sens, et avec une certaine excitation et une certaine nervosité, tu jettes un coup d’œil aux quatre coins de la carte pour voir ce que tu as. Si tu gagnes, tu te sens comme un roi. Mais si tu perds, tu perds ton argent et toutes ces bonnes émotions », ajoute-t-elle.
Xia Li a tenté sa chance sur trois couples masculins : Wang Junkai et Wang Yuan du groupe de musique TFBoys, l’acteur Huang Jingyu et le chanteur Xu Weizhou, et enfin les personnages fictionnels masculins Albus Dumbledore et Gellert Grindewald, tirés de la série Harry Potter de J.K. Rowling.
« Quand je ‘shippe’ un couple, comme beaucoup de fans, je m’investis à fond. C’est une expérience très chargée en émotions. Tes sensations sont fortement affectées toutes les fois où ton couple interagit. S’ils travaillent souvent ensemble et interagissent intimement, ça te comble de joie. Le bonheur que tu ressens est indescriptible. Mais si ton couple a une « BE », tu as le cœur brisé, comme si tu avais rompu toi-même », raconte Xia Li.
Plus de 1 000 fans attendent l’apparition de Xiao Zhan, le 12 décembre 2019, dans un centre commercial de Nankin, province du Jiangsu. Xiao Zhan est devenu l’une des stars chinoises les plus en vue après la diffusion de la web-série fantastique The Untamed (2019), dans laquelle il entretient une amitié fusionnelle avec l’acteur Wang Yibo
Des couples puissants
Le « shipping » a vu le jour en Chine à la fin des années 1990 sur des sites Internet comme Jinjiang Literature City, équivalent chinois du site de fandom « Archive of Our Own ». Il est resté une petite sous-culture jusqu’au début des années 2010. À l’instar des « shippers » d’Occident et du Japon, les « shippers » chinois se sont concentrés sur les fanfictions et les œuvres basées sur des personnages fictionnels issus de la culture ACG, des livres, des films et des séries populaires.
Le « shipping » s’est popularisé avec la web-série Addicted, une adaptation du roman du genre boys’ love qui narre l’histoire d’amour d’un couple gay au lycée. Diffusée le 29 janvier 2016, elle est devenue virale du jour au lendemain. Les acteurs Huang Jingyu et Xu Weizhou sont rapidement devenus célèbres pour leur interprétation de ce couple gay. Les fans ont encensé leur performance et certains ont même été convaincus qu’ils étaient en couple dans la vraie vie. Les « shippers » les ont surnommés « Yuzhou », une combinaison de leurs noms d’acteurs.
Huang Jingyu est devenu l’un des jeunes acteurs les plus populaires de Chine et a joué dans des films à gros budget comme Operation Red Sea (2018) ou Pegasus (2019). En 2020, il a été classé 36ème sur la liste des célébrités de Forbes China. Xu Weizhou a fait carrière en tant qu’auteur compositeur interprète.
Cependant, alors qu’il restait trois épisodes à diffuser, les régulateurs ont forcé les sites de streaming vidéo à supprimer Addicted fin 2016. Cette annulation soudaine a eu lieu quelques jours seulement avant l’interdiction officielle de représenter des homosexuels dans les programmes télévisés, qui s’inscrit dans le cadre d’un réaménagement plus large des contenus médiatiques.
Les nouvelles règles, publiées le 2 mars 2016 par le Comité de production télévisée soutenue par l’État de l’Alliance chinoise de la radio, du cinéma et de la télévision, a interdit aux programmes d’inclure « des relations et comportements sexuels anormaux », regroupant « les relations homosexuelles » avec « l’inceste » et « la perversion, les agressions, les abus et les violences sexuels. »
Malgré le triste sort d’Addicted, l’industrie chinoise du divertissement a pu profiter de l’énorme potentiel commercial de la culture du « shipping », mais a aussi trouvé un moyen infaillible de créer une émission à succès et de rendre célèbres en une nuit deux acteurs inconnus.
Un flot de séries tirées de fictions boys’ love ont suivi, comme Guardian (2018), The Untamed (2019) et Word of Honor (2021), toutes adaptées d’œuvres écrites par des écrivains populaires appartenant au genre danmei. Pour contourner la censure, les producteurs ont stratégiquement transformé les histoires d’amour homosexuel brossées dans les romans originaux en « bromances » ou amitiés platoniques. Les internautes ont caricaturé ces relations retravaillées en « fraternités socialistes » ou « fraternités aux caractéristiques chinoises ».
Les émissions de talents sont devenues une autre pépinière majeure pour le « shipping ». Le télécrochet Super Vocal diffusé sur Hunan TV (2018), qui a mis en lumière 36 chanteurs masculins, a été une mine d’or pour les fans de « shipping ». N’importe quel duo des 36 chanteurs qui créait une alchimie devenait des candidats de choix.
Parmi eux, A Yunga et Zheng Yunlong furent les plus populaires. Les fervents « shippers » ont été fascinés par leurs interactions. Nommés « Double Yun », les deux hommes se sont classés parmi les couples « shippés » favoris en 2018 et en 2019. Les fanfictions et autres œuvres qui les imaginent amoureux abondent sur Internet. Tirant parti de cette base de fans enthousiastes, les deux chanteurs, jusque-là inconnus, ont été submergés de contrats publicitaires.
De plus en plus de marques réalisent le pouvoir commercial du « shipping » et signent avec des duos de stars. Ainsi, elles peuvent mobiliser à la fois leurs fans individuels et les « shippers », dont le pouvoir d’achat combiné est bien plus important. De plus, le marketing du « shipping » peut aider des marques à séduire les jeunes consommateurs.
Rien qu’en 2019, « Double Yun » est apparu dans des publicités, a promu cinq marques dont Head & Shoulders et Olay et a enregistré la chanson du film Midnight Diner, paru en 2019. Leur vidéo promotionnelle pour la chanson a récolté un million de vues en seulement trente minutes.
Le magazine de mode Harper’s Bazaar est celui qui a le mieux senti le potentiel commercial du « shipping ». Depuis 2016, la version numérique du magazine a mis près de trente couples fictionnels en couverture. Leur numéro le plus vendu mettait en scène Wang Yibo et Xiao Zhan, avec 1,27 millions de tirages à 1 dollar l’unité (0,84 euros), générant 1,27 millions de dollars (1,07 millions d’euros) de revenus.
Photos de trois web-séries populaires : The Untamed (à gauche), Word of Honor (en haut à droite), Addicted (en bas à droite). Ces séries ont été adaptées de romans dits boys’ love mettant en scène des relations amoureuses ou des amitiés fusionnelles entre deux personnages masculins. Les fans ne sont pas seulement enthousiasmés par la relation qui lie les personnages, ils inventent également des histoires fantastiques qui impliquent les acteurs réels
L’angoisse de l’intimité
Derrière le boom de la culture du « shipping » se cache une sombre réalité. D’après le ministère chinois des Affaires civiles, la Chine comptait 240 millions de célibataires en 2018, soit l’équivalent des populations de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni réunies. D’après les statistiques, plus de 77 millions d’adultes en Chine vivent seuls, et ce nombre devrait atteindre les 92 millions d’ici la fin 2021.
Face au coût inabordable de l’immobilier, à la pression du travail et à l’augmentation du coût de la vie, de plus en plus de jeunes en Chine choisissent de rester célibataires et de vivre seuls. Certaines études ont révélé que les femmes ont plus de réserves que les hommes en matière de mariage et de relations amoureuses.
En coopération avec l’Académie chinoise des Sciences sociales, l’application de rencontres Tantan a étudié les attitudes de la génération Z (celle née après 1995) à l’égard des relations amoureuses et du mariage. D’après l’enquête publiée en janvier, 70,7% des hommes interrogés espèrent trouver une partenaire le plus rapidement possible, contre seulement 44,9% des femmes.
De plus en plus de jeunes femmes en Chine font des études et accèdent à l’indépendance économique, si bien qu’elles sont, à certains égards, plus résistantes aux mœurs traditionnelles du mariage que les hommes. La quête d’une relation plus épanouissante devient la norme et cette mutation s’opère aussi bien dans les grandes villes que les petites.
60% des hommes ont déclaré qu’ils pourraient épouser une femme avec qui ils s’entendent « relativement bien », tandis que 65% des femmes interrogées disent ne pas être disposées à compromettre leur quête d’une « relation de haute qualité » avec le bon partenaire. En outre, 41% des femmes disent accepter de « mourir seule », contre seulement 20% des hommes.
Dans une certaine mesure, le « shipping » offre une alternative aux jeunes Chinoises qui veulent vivre une « relation de haute qualité ».
D’après un sondage en ligne réalisé le 26 mai par la base de données de l’industrie du divertissement FUNJI auprès de 4 521 « shippers », 99,2% ont déclaré être des femmes et 86% ont dit avoir moins de 25 ans. De plus, 90,3% ont affirmé être célibataires, dont 48% n’ont jamais été en couple.
Le « shipping » est un moyen relativement sûr de jouir de la douceur de l’amour, d’après Zou Qiyi, étudiante diplômée de l’Université du Peuple de Chine, amoureuse de Gong Jun et Zhang Zhehan, les deux protagonistes de la web-série Word of Honor (2021), adaptée du web-novel d’arts martiaux de genre boys’ love Tian Ya Ke, écrite par Priest.
« Je n’ai jamais eu de relation, mais j’ai été blessée un nombre incalculable de fois, à cause de flirts insignifiants et d’amours non réciproques. Au fond, l’amour et les relations provoquent en moi des peurs et des angoisses. Le couple que je ‘shippe’m’apporte du réconfort. J’ai l’impression que je peux ressentir ce qu’est l’amour grâce à leur relation », confie Zou Qiyi à Vision Chine.
Lin Xing, une jeune universitaire qui fait des recherches sur la pop culture à l’Université de Fudan, explique que les « shippers » refusent souvent de faire face à toute réalité qui remet en question ces relations intimes hautement idéalisées.
« Habituellement, les ‘shippers’ ne se soucient pas vraiment de savoir si la relation du couple qu’ils aiment existe réellement. Ils évitent la réalité car, au fond, ils savent tous qu’elle n’est pas aussi rose que l’illusion dont ils se bercent », explique Lin Xing à Vision Chine.
Lin Xing a appris que dans de nombreuses circonstances, les « shippers » tissent des liens émotionnels les uns avec les autres dans le monde des fanfictions qu’ils créent.
« Les ‘shippers’ sont très créatifs. Ils écrivent des fanfictions, ils dessinent, ils montent des vidéos et communiquent en ligne avec des fans qui partagent les mêmes idées. Certains de ces créateurs sont très talentueux et produisent un travail d’assez grande qualité. Ils aiment les fandoms où ils peuvent discuter librement, échanger leurs pensées, créer et partager leur travail. Donc, en réalité, les fans s’apprécient les uns et les autres et aiment le contenu créatif qu’ils produisent », complète Lin Xing.
À l’instar d’autres sociétés d’Asie de l’Est au rythme effréné, Lin Xing souligne que les relations intimes, qui constituent une « exigence forte » et de plus en plus rare, provoquent une angoisse à l’origine de la culture du « shipping » en Chine. « Les relations intimes sont une chose qui manque à tout le monde, dont tout le monde a besoin, mais que tout le monde ne peut pas avoir », résume Lin Xing.
« J’ai pratiqué le ‘shipping’ et je sais que ce ne sont peut-être pas de vrais couples, mais ces idylles virtuelles et sucrées me réconfortent temporairement et me font oublier ma réalité sombre et sans amour. Essentiellement, c’est parce qu’au fond de mon cœur je crois encore à l’amour, que j’ai faim de ces douces histoires », confie Qing Cheng, 24 ans, qui a déjà inventé six couples fictionnels.
« C’est un peu comme agiter une carotte devant un âne. Notre vie a besoin de quelque chose de doux pour nous aider à traverser toutes les épreuves. Peu importe que cette douceur provienne du miel naturel, du sucre de canne transformé ou d’édulcorants artificiels », conclue Qing Cheng pour Vision Chine.
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